En termes de mobilité, quelles sont aujourd’hui les fractures dans « l’accès à » ? Qui est concerné ?
Il n’existe pas de grande enquête mais les études parcellaires convergent vers un constat : les di ffi cultés sont désormais beaucoup plus fortes, car chacun dépend de plus en plus de la mobilité. Pour résumer, entre 1970 et 2000, le logement se périurbanise, mais l’emploi reste très concentré. Depuis 2000, l’emploi suit cette périurbanisation, accentuant les distances à parcourir chaque jour. On constate alors des eff ets d’une exclusion sociale toujours plus forte liée à la mobilité en tant qu’« accès à » – au travail, aux soins, aux loisirs, aux relations.
L’enjeu de la mobilité inclusive réside là, dans l’inclusion sociale des populations concernées : les jeunes, les adultes en formation, en insertion sociale et professionnelle, les habitants éloignés des pôles de transport, les personnes âgées, les personnes migrantes, etc. Bien sûr, les di ffi cultés sont vécues de manière singulière et les réponses à apporter diff èrent. Par exemple, pour les personnes âgées vivant à la campagne et ne pouvant plus conduire, il s’agit de les aider à accéder aux services – livraison de repas à domicile, aides familiales –, qui sillonnent ainsi les campagnes.
« Chacun est de plus en plus dépendant de la mobilité. D’où l’absolue nécessité d’une mobilité inclusive. »
Quelles sont les causes de ces exclusions ?
Par exemple, il y a la technicité grandissante de l’offre de mobilité. Prendre les transports, cela nécessite de maîtriser une somme de savoirs : lire un plan, se repérer dans l’espace, utiliser des bornes automatiques… Pour les personnes en situation d’analphabétisme ou d’illettrisme, soit 1 personne sur 10 en France, c’est d’une grande complexité. Donc, comment faire en sorte d’inclure chacun ?
Les offres de service et la qualité de l’information se perfectionnent sans cesse : horaires disponibles sur différents canaux, mis à jour en temps réel, itinéraires sur mesure, applications. Mais là encore, comment réussir à en faire bénéficier tout le monde ? Il doit y avoir une véritable réflexion et des solutions à imaginer pour que le service soit utile à tous.
Quelles sont les pistes de solutions envisagées ?
Jusqu’à présent, il y a différents systèmes assez simples qui ont le grand mérite d’exister car ils tissent des liens, remettent les gens en mouvement, sont des leviers d’action pour les collectivités locales. Ce sont, par exemple, les plateformes de mobilité présentes dans les territoires, qui accompagnent les habitants et font en sorte de lever les freins à la mobilité. De nombreuses formes existent ainsi : transports à la demande, autopartage, etc.
Ces systèmes ont généré une dynamique, et la LOM (loi d’orientation des mobilités, votée en décembre 2019) devrait permettre de passer à la vitesse supérieure, puisqu’elle va instaurer des autorités organisatrices de la mobilité (AOM) partout. Cela va permettre un pilotage très fin par les collectivités locales, qui pourront injecter davantage d’expertise technique, de rationalité dans leur offre de mobilité, avec, in fi ne, un effet positif sur les dynamiques d’emplois et de services.
Depuis 2000, le groupe RATP propose les Ateliers mobilité® qui participent à faciliter les déplacements de tous. Les agents y transmettent à de petits groupes les connaissances indispensables à l’accès au réseau francilien : savoir lire une carte, établir un itinéraire, utiliser les distributeurs de tickets, etc. Initialement conçue pour un public éloigné des transports en commun, l’initiative s’est affinée, avec des modules pour les personnes en situation de handicap, d’autres pour les élèves de troisième et des lycées professionnels afin qu’ils maîtrisent le réseau pour faire leur choix d’orientation en toute liberté. Ce service est amené à s’élargir, pour s’adresser aux seniors, aux entreprises, etc.