Qualité de villes, le magazine du groupe RATP qui donne à voir LA VILLE AUTREMENT.

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Rêver la ville

(Re)dessine-moi une ville

Est-ce la ville qui change nos usages ou nos usages qui la transforment ? Le design urbain s’inscrit à la jonction de ces deux hypothèses. Cette approche souple, collective, parfois frugale, vise à fabriquer une cité apaisée, utile et ludique.

S’abriter de la chaleur, se promener dans un parc tout près de chez soi, faire du sport ou jouer avec ses enfants au pied de son immeuble, pique-niquer au coin de sa rue : après la crise sanitaire et avec la crise climatique, la reconquête de l’espace public est au centre de l’attention. Comment penser les aménagements pour répondre à ces besoins vitaux, à ces usages émergents ? Comment concevoir une ville apaisée, verte, inclusive ? Pour que l’espace devienne service, il doit être dessiné, pensé comme tel, au plus près des attentes des habitants. C’est le rôle du design urbain.

 

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De la lumière, des bancs, des arbres, des poubelles : ces ingrédients sont nécessaires mais non suffisants pour faire vivre une rue ou un quartier. Partout dans le monde, les villes ont compris que des interventions, parfois légères mais qui changent tout, étaient nécessaires. « Il suffit souvent de peu de chose pour amener de la valeur ajoutée à un espace. Le design urbain permet de tester des usages et de vivre la ville autrement », note Dorothée Noirbent, designer lyonnaise d’espaces urbains. À Paris, il a suffi de transformer les murs d’un terrain de basket urbain de Pigalle en un véritable tableau, rose fuchsia, bleu profond et jaune, pour qu’il devienne un lieu désirable pour les sportifs… et pour les photographes. À Sydney, avant de se lancer dans une stratégie de développement de l’espace public de longue haleine, la ville a mené un premier projet pilote, baptisé By George. Objectif : revitaliser les ruelles adjacentes et délaissées d’une artère majeure de la capitale, George Street. Pendant six mois, elle a invité artistes et architectes à concevoir de petites interventions. Plus de 50 se sont prêtés au jeu dans une vingtaine de ruelles et, avec plus de 80 bars ouverts, ces rues sont redevenues actives et fréquentées. 

À Paris, De Facto, l’établissement public chargé de mettre en valeur le quartier d’affaires de La Défense, organise tous les deux ans « Forme publique », une biennale de création de mobilier urbain. Ce démonstrateur à grande échelle permet d’observer, avec des installations en place pendant un an, l’appropriation de mobilier urbain innovant par les différents publics, comme les toboggans et tapis investis chaque week-end par les enfants ou les installations sportives Bonjour prisées par les salariés, mais aussi de suivre les variations saisonnières autour de l’utilisation de ce mobilier.

Enfin, le design urbain peut métamorphoser des espaces en donnant toute leur place à de nouveaux usages et comportements. Au Canada, à Calgary, le projet Park Park a transformé un banal parking de quartier en espace multi-usages pour les personnes et les véhicules. Les voitures y sont considérées comme des « invitées » et cinq des 30 places de stationnement ont été allouées à un bel espace destiné aux piétons. Différents services y sont proposés, matérialisés par du mobilier urbain en forme de pictogrammes géants de couleur vive. On peut y charger son téléphone, regonfler les roues de son vélo ou jouer au basket. On peut aussi s’asseoir, manger ou se retrouver. Ludique, un peu provocant, véritable manifeste pour un design urbain joyeux, Park Park démontre, selon ses créateurs de l’agence de design Publiccity, que « more is more ».

Grand Lyon

Une transformation concertée

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Comme beaucoup de métropoles, le Grand Lyon souhaite redéfinir sa politique d’aménagement des espaces publics. Pour redessiner la ville et ses usages, la métropole joue la carte de la concertation, comme dans le projet d’aménagement de la Presqu’île, l’hypercentre de Lyon. À la fois très encombré par les voitures et très minéral, ce quartier emblématique concentre un faisceau de problématiques urbaines. La collectivité affiche des objectifs ambitieux pour ce morceau de ville complexe : elle souhaite réduire les îlots de chaleur, la circulation automobile, améliorer l’accès pour les vélos et les piétons, maintenir des logements accessibles pour les familles, les seniors et les jeunes, favoriser le commerce, et aussi préserver un quartier touristique, classé au patrimoine mondial de l’Unesco.

« Nous souhaitons une ville abordable en termes de prix du logement, une ville respirable, apaisée, et qui réponde aux enjeux du réchauffement climatique, très végétalisée, avec des espaces publics partagés et inclusifs. La concertation vise à débattre des actions d’apaisement à mener », ajoute l’élue. « Selon les secteurs, voulons-nous de grandes aires piétonnes, des zones à trafic limité ou modifions-nous simplement le plan de circulation de certains secteurs, pour dissuader de leur traversée en voiture ? Nous mettons à la concertation deux scénarios. Ces choix concernent les habitants, bien sûr, tous les acteurs économiques, notamment les commerçants, autour de la question des livraisons, ainsi que tous les visiteurs – un Grand Lyonnais sur deux se rend en Presqu’île au moins une fois par mois. »

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« Ces choix concernent les habitants, tous les acteurs économiques (...), ainsi que tous les visiteurs. »

Béatrice Vessiller

Vice-présidente de la Métropole de Lyon, déléguée à l’urbanisme, au cadre de vie, à l’action foncière

Seattle

Smart Cities, Uber cities ?

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En influant sur les usages et sur nos choix de consommation, les plateformes numériques (Airbnb, Uber, Deliveroo…) façonnent un nouvel urbanisme. Elles sont parfois devenues si puissantes qu’elles vont jusqu’à peser sur la gouvernance de certaines villes. À Toronto, Google avait obtenu de la municipalité le permis d’aménager un quartier « du futur », conçu et piloté à partir des données générées par ses utilisateurs. Devant l’opposition citoyenne, le projet a été annulé. À Seattle, où se trouve le siège d’Amazon, la présence de ce poids lourd des GAFA participe à la gentrification du centre-ville. Le géant de l’e-commerce a bâti un quartier entier de tours pour abriter ses activités et occupe désormais 20 % de la surface commerciale de la ville. Surnommée Amazon City, Seattle a retrouvé le chemin de la croissance. Sa population augmente. Mais les loyers aussi.

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